Cadet-ROUSSEL était-il rennais ? n°1

Posté par LPBSM le 27 juillet 2015

Bonjour,

 La période estivale est une période où l’on peut se « plonger » dans un passé récent mais qu’on néglige parfois, ou qu’on ignore tout simplement, sans se sentir « submerger » .

Ici, on « aborde » un passé, ou l’on se « replonge » dans un passé, de moins de cent ans sur Rennes,  Révolutionnaire dans sa vérité .

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Cadet ROUSSEL était-il vraiment rennais ?   Oui, il y a bien eu un ROUSSELLE à Rennes qui louait son « Château branlant », appelé également « Maison de Cadet-Roussel » par les gens du quartier Saint-Martin, à des lavandières ; mais la chanson était tellement populaire que l’association se fit facilement .

Le Chateaud Branland ou de Cadet Roussel  quater_redimensionner

Au bout de l’ancien pont Saint-Martin, à trois arches en pierre, cette bâtisse du XVème siècle résistait encore en 1900 .  Elle s’écroula en août 1936 .

Maison de Cadet Rousselle peinte par Jules NOEL vers 1860

Peinture à l’huile du peintre Jules NOEL de 1860 au musée des Beaux Arts de Rennes

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Le vrai Cadet ROUSSEL (1743-1807)  a vraiment existé  au temps de la fin du règne de Louis XIV puis de la révolution française,  sous le nom de Guillaume Joseph ROUSSEL né à Orgelet, dans le Jura, et qui s’établira à Auxerre en 1763 après le décès de son père mort à l’âge de 48 ans  (le 18 avril 1762) .

Cadet, car il avait un frère ainé, Claude-Antoine ROUSSEL ; né deux ans avant lui (en 1741), il était donc le cadet du cavalier de dragon volontaire dans la Légion de Soubise en garnison à Tournon dans le Vivarais .

A Auxerre, Il se plaça d’abord comme domestique, puis laquais dans quelques bonnes maisons de la ville . 

Mais, opportuniste, il comprit très vite qu’il lui était possible de se faire une place plus enviable et surtout plus gratifiante .

Il acheta donc assez rapidement une place de Clerc d’huissier, ce qui lui permit de se familiariser avec le droit, d’apprendre le métier et de faire quelques rencontres qu’il utilisera à son profit .

Peu auparavant, il avait épousé une demoiselle Jeanne SERPILLON d’assez bonne famille, qui lui avait apporté une dot confortable ; il faut ajouter que la demoiselle avait seize ans de plus que son époux .   Cela posera des problèmes plus tard car elle mourut avant lui, le 14 janvier 1803  .

Le mariage ayant été sans descendance, Cadet ROUSSEL se verra obligé de rendre la dot à l’héritière de son épouse .  Il montra toute l’affection qu’il avait pour sa dot et sa belle-famille en se remariant en secondes noces avec la nièce de son épouse, Reine BARON, qui en était l’héritière, le 20 Avril 1803 (soit trois mois après le décès de son épouse) .  Cadet ROUSSEL avait alors soixante ans et sa jeune et nouvelle épouse trente-sept .  Ils passeront moins de quatre ans ensemble .

C’est sans doute grâce à son parrain et à son oncle, tous deux huissiers au Bailliage d’Orgelet qu’il doit d’avoir reçu quelques notions permettant de faire illusion quant à ses capacités d’exercer la charge de  Premier  Huissier .  Il fut assez astucieux pour imaginer comment y parvenir et assez finaud pour arriver à ses fins en épousant une dot .   Il obtint ses lettres de provision, car on le reconnaissait  « pour un très honnête homme, de bonne vie, mœurs et conversation, fidèle et affectionné au service du Roi » .

Il put donc acheter, le 15 mars 1780, la charge de Premier huissier audiencier au bailliage présidial d’Auxerre et y est reçu dans ses fonctions ; charge assez considérable, puisqu’elle lui laissait un revenu de deux mille livres par an .

Installé dans la « Basoche » (La Basoche : était le nom de la cour de justice du Roi au XV ème siècle) .  il commença, à partir de 1789,  à multiplier ses excentricités .  Car, tout en étant devenu Maître Guillaume ROUSSEL, il n’en était pas moins un fêtard et un noceur bien que membre du Comité de Salut Public .

Retournant sa veste à plusieurs reprises dans les années troubles de la Révolution ; adulé lorsqu’il organisait, avec un certain brio, des festivités en l’honneur de la déesse Raison  [ [Cadet ROUSSEL participe le 30 décembre 1793 à la fête de la déesse Raison, dans la cathédrale d’Auxerre : …« Sur un autre char, l’Huissier ordonnateur de la fête [Cadet Roussel]… vêtu d’un nankin couleur de chair, le dos orné de deux grandes ailes bleues en carton, et laissant descendre de son menton une longue barbe blanche en filasse. Il représentait le temps […] Il tenait à la main une faulx, mais il la tenait renversée pour montrer comme quoi la République était éternelle. « ] ]

Extrait de : http://huissier.justice.perso.neuf.fr/cadet.html

 

Il fut jeté, sans ménagement, en prison lorsque la dictature de ROBESPIERRE prit fin .  Ce verbeux impénitent, infatué de sa personne, aimant les bons mots et les grands discours, ne pouvait qu’attirer sur lui que beaucoup d’acrimonies .

Jovial et excentrique selon certains, roublard et franc lèche-bottes selon d’autres .

Et c’est ainsi qu’en 1792, parodiant la chanson populaire de Jean de Nivelle (*1), chanson composée après 1465 sur la demande de Louis XI qui souhaitait se venger de la défection de Jean III de Nivelle (ou Jean Ier de Montmorency – Nevel)  dans son armée pour combatte Charles le Téméraire (comte de Charolais) et des princes ligueurs coalisés en 1465 dans la « Ligue  du Bien public »,  qui avait tant amusé les français au XV ème siècle,  Gaspard de CHENU en fit une parodie adaptée à son époque .  Le Sieur de BELLONE, dans « Chansons folastres et prologues tant superlifiques que drolastiques des comédiens françois » revus et augmentés, ne publiera qu’en 1612 une version très édulcorée des libelles populaires composées sur Jean de Nivelle pour se moquer de son comportement et surtout du siège de Paris .   Mais nous sommes sous Louis XIII (1610-1643) et le siège de Paris de 1465 est oublié .   Seul compte le mariage de Louis XIII et d’Anne d’Autriche en 1612 .

 

Cette nouvelle version a donc été remise à la mode par un nobliau resté fidèle au Roi après 1789, à savoir le chevalier  Gaspard de CHENU, seigneur du Souchet et en partie de Prunier, chansonnier à ses heures, auteur de quelques spirituelles satires contre les nouvelles modes et les nouveaux puissants (entendre par là « les révolutionnaires » ou « les sans-culottes ») .

Ce pamphlet a eu, à sa grande surprise, un succès retentissant dans toute la ville d’Auxerre .

Alexandre-Charles-Gaspard de CHENU (1717-1795) fut l’un des signataires, le 24 juillet 1790, de la très fameuse « Protestation des gentilshommes de Puisaye » contre le décret sur la suppression de la noblesse héréditaire et des titres honorifiques par l’Assemblée Constituante le 19 juin 1790 (complétant ainsi l’œuvre qu’elle avait commencée dans celle du 4 août 1789)  .

19 juin1790 suppression de la noblesse héréditaire et des titres honorifiques

Estampe de l’époque représentant la décision de l’Assemblée constituante  du 19 juin 1790  et ce qui s’en suivit

Depuis le début de la révolution, Gaspard de CHENU exerçait sa plume acide au détriment des hommes ralliés au nouveau pouvoir de la « Convention » .

Cadet ROUSSEL n’y échappa pas .

Car Cadet ROUSSEL siégeait à la Société des amis de la République, au Comité révolutionnaire et était devenu membre de la « Société populaire d’Auxerre » où il faisait montre d’un zèle très ostensible .  En septembre 1793, il fut même inquiété pour avoir commis quelques excès au cours d’une visite domiciliaire du comité de surveillance (il avait organisé une orgie chez quelqu’un qu’il venait de faire arrêter) .  

Il sera alors destitué du Comité de surveillance, puis déféré devant le tribunal criminel d’Auxerre, dont il était l’Huissier .  Il sera temporairement suspendu de ses fonctions .  Mais comme c’est  un  ami de Nicolas MAURE (*), lui-même ami de ROBESPIERRE, on ne l’inquiètera pas plus (voir ci-dessous) .

 Portrait de Nicolas MAURE

(*) « Nicolas MAURE » (1743-1795), est un « puissant » conventionnel représentant de l’Yonne, ex-marchand épicier à Auxerre, et également célèbre par ses excentricités révolutionnaires (il organisa la « Fête de la Terreur » en mai 1795, avec quelques guillotines à l’appui et se crut appelé à un grand destin parce qu’un jour MARAT l’avait appelé: « mon fils », en se  proclamant publiquement et imprudemment le favori de ROBESPIERRE) .

Il se suicida le 3 juin 1795  d’un coup de pistolet, à Paris, sachant le sort qui  l’attendait  après la mort de ROBESPIERRE et l’épuration qui s’en suivit  .

 

Cadet ROUSSEL  va enfin connaître la vraie prison, le 9 septembre 1795 .  Il est prévenu « d’arrestations arbitraires et de faux dans l’exercice de ses anciennes fonctions » au sein du Comité révolutionnaire d’Auxerre .

Son incarcération fut de courte durée et il figurera au nombre des amnistiés par la loi du 11 octobre 1795  (l’amnistie de vendémiaire an IV : http://chs.revues.org/458) .

Il se contenta par la suite d’exercer son ministère d’huissier, sans plus jamais se faire remarquer, pendant le Directoire, le Consulat et l’Empire (il fut inhumé  le 27 janvier 1807) .

La chanson n’avait d’autre but que  de ridiculiser l’ancien huissier à la Cour royale qui s’était transformé en un ardent Révolutionnaire .

 

En 1781, Cadet ROUSSEL s’était porté acquéreur d’une petite maison à Auxerre située place du Prétoire (actuelle place du Maréchal Leclerc),  souhaitant agrandir sa demeure ; il obtint de la municipalité le droit de construire une loggia de deux pièces au-dessus de l’arc qui reliait l’horloge à cette place .

Guillaume Joseph ROUSSEL possédait ainsi deux maisons (la chanson va lui en attribuer trois) .  

Puis, la Révolution Française éclata et grâce à l’un de ses farouches opposants (Gaspard de CHENU), l’imagerie populaire de Cadet ROUSSEL avec son bicorne ou son tricorne, sa lorgnette et son parapluie (*4) va naître et en faire une image d’Epinal (ce qui est un « comble » lorsqu’on habite  Auxerre !)  …

 image d'Epinal 02 Illustration de Cadet Rousselle (Pellerin, 1863)  image d'Epinal 03

 Ce sont les volontaires auxerrois rejoignant l’armée du Nord, pour lutter contre les armées européennes royales coalisées et opposées à la « Révolution », en 1792, qui en firent une chanson de marche adoptée par presque toute l’armée du Nord .

Son très grand succès ne pourra cependant pas rivaliser avec le chant de marche de l’armée du Rhin (« La Marseillaise » importée par les volontaires marseillais) qui deviendra l’hymne national .

A suivre …

J.M. MARTIN pour LPBSM

P.S.:  C’est surtout le modèle républicain qui était craint par les royaumes étrangers parce qu’ils avaient peur que cela fasse tache d’huile dans les divers royaumes européens .

1ère République :

le 21 septembre 1792 avec l’abolition de la Royauté, l’assemblée législative, devenue Convention, tient sa première séance publique et proclame la Première République qui se nomme officiellement République française.  Je crois que c’est avec Valmy, cette victoire de l’armée des gueux, que le sentiment national, ce sentiment profond de la notion de République, s’ancre dans l’esprit et dans le coeur des Français.

La Première République va durer jusqu’en mai 1804. C’est une nouvelle forme politique, nouvelle forme d’exercice du pouvoir en Europe et, le 22 septembre 1792, décision est prise de dater les actes de l’an I de la République .

Le 25 septembre 1792, la République est déclarée une et indivisible.  Le calendrier républicain est adopté en octobre 1793.
De 1792 à 1802, la France est en guerre avec le reste de l’Europe .  A cela s’ajoute le problème intérieur de la Guerre de Vendée .  La Convention nationale traverse plusieurs crises politiques qui amènent trois formes de gouvernement :
− de septembre 1792 à octobre 1795, avec la période dite de la Terreur d’avril 1793 à juillet 1794 (date de la chute de Robespierre), le pouvoir est exercé par le Comité de Salut Public dominé par les Montagnards.
− du 26 octobre 1795 au 9 novembre (18 brumaire) 1799, c’est le Directoire.
− Puis du 10 novembre 1799 au 18 mai 1804, la prise de pouvoir du général Bonaparte amène le Consulat. La Première République prend fin avec le couronnement de Napoléon Ierqui instaure le Premier Empire.
Nous sommes en 1804, l’Empire est mis en place et la première République a vécu.
Il faut attendre quarante-quatre ans et bien des événements historiques avec, un Empire, deux Restaurations et une Monarchie dite monarchie de Juillet, pour que renaisse de ses cendres la République.
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Article rédigé par
Jeanne BRUNEREAU
membre de la LDH
janvier 2011

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